Marie de Nazarteh et Marie de Béthanie
On a parfois comparé la Vierge Marie et la sœur de Lazare qui s’appelait également Marie (Jn 11, 1). Toutes deux sont des contemplatives, grandes écoutantes de la Parole divine (Lc 10, 39). Marthe l’est également, mais se laisse « inquiéter et troubler par beaucoup de choses » (Lc 10, 41). C’est justement dans cette inquiétude excessive que réside sa faiblesse du moment. Son nom araméen est Martha, féminin de Mar (maître, seigneur). Il la désigne comme l’aînée de la famille et maîtresse du domaine, ce que confirme le début du passage : « Marthe le reçut » (Lc 10, 38). En tant que Martha, que « maîtresse » de maison, elle aurait dû accomplir la noble tâche d’accueillir son hôte de marque et lui tenir compagnie jusqu’à ce que tout soit prêt. À ce titre, elle n’aurait jamais dû « être tiraillée par les multiples soins du service » (Lc 10, 40). Comment a-t-elle pu rétrograder à l’humble place des servantes et éventuellement de sa sœur cadette ? Si Marthe occupe ainsi la place du service matériel, c’est qu’elle l’a bien voulu. Tenaillée par son inquiétude et son perfectionnisme domestique, elle a dû demander à sa cadette d’accepter que leurs rôles respectifs soient momentanément inversés. Marie a alors « choisi la meilleure part », comme le dit précisément Jésus (Lc 10, 42). Elle ne s’est pas haussée d’elle-même à cette place de choix, « aux pieds du Seigneur » (Lc 10, 39). Elle a simplement choisi d’obéir à son aînée. Elle a peut-être perçu qu’elle était humainement moins apte à cette noble fonction, mais elle ne s’est pas inquiétée : elle s’est abandonnée avec confiance comme un enfant. Son total abandon fut sa seule loi. S’en étant rendu compte, Jésus lui parle à cœur ouvert (Lc 10, 39). Il la nourrit de sa Parole. Marthe n’est pourtant pas moins contemplative que sa sœur, mais son inquiétude l’empêche de s’abandonner et de profiter de la grâce du moment. Certes, elle ne peut pas matériellement écouter le Maître, mais elle pourrait au moins préparer le repas paisiblement, ce qui serait encore l’écouter, mais autrement. La Vierge Marie, plus qu’aucune autre, a elle aussi choisi la meilleure part, celle de l’obéissance à Dieu par amour. Jésus fut très proche de Lazare, son « ami » (Jn 11, 11). On peut penser que, de son côté, la Vierge Marie fut comme une sœur envers sa contemplative amie de Béthanie.
fr. Bernard-Marie, ofs
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